Maupassant et le journalisme

Voilà un extrait de l’article “Politiciennes” (1881) signé «Maufrigneuse» et publié dans le Gil Blas qui pourrait faire allusion au personnage de Madeleine Forestier :

(…)Mais la politique, science de second ordre, où le flair instinctif, la rouerie naturelle, la séduction, l’habileté, les finesses et les subtilités triomphent sans cesse des raisonnements les plus sains, se prête infiniment bien au développement complet de toutes les qualités natives de la femme. Faible, mais armée de ruse pour lutter contre notre force, cuirassée de charme et de grâce pour combattre notre fermeté, insinuante pour triompher de notre logique, subtile et pratique, peu influencée par les grandes théories philosophiques, humanitaires et ronflantes, elle a su être souvent la conseillère cachée, utile et ferme de bien des grands hommes qu’elle guidait, dans l’ombre, de ses conseils.

On pourrait même, je crois, prouver, l’histoire en main, que fort peu de politiciens ont échappé aux influences féminines. Dans notre patrie, principalement, pays de la loi salique, elles ont exercé plus que partout ailleurs leur pouvoir dirigeant sur les maîtres de l’État. Gil BlasOn pourrait même, je crois, prouver, l’histoire en main, que fort peu de politiciens ont échappé aux influences féminines. Dans notre patrie, principalement, pays de la loi salique, elles ont exercé plus que partout ailleurs leur pouvoir dirigeant sur les maîtres de l’État.

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Extrait de l’article « Réponse aux critiques de Bel-Ami », paru dans le journal Gil Blas, le 7 juin 1885:

J’ai voulu simplement raconter la vie d’un aventurier pareil à tous ceux que nous coudoyons chaque jour dans Paris, et qu’on rencontre dans toutes les professions existantes. Est-il, en réalité, un journaliste ? Non. Je le prends au moment où il va se faire écuyer dans un manège. Ce n’est donc pas la vocation qui l’a poussé. J’ai soin de dire qu’il ne sait rien, qu’il est simplement affamé d’argent et privé de conscience. Je montre dès les premières lignes qu’on a devant soi une graine de gredin, qui va pousser dans le terrain où elle tombera. Ce terrain est un journal. Pourquoi ce choix, dira~t-on ? Pourquoi ? Parce que ce milieu m’était plus favorable que tout autre pour montrer nettement les étapes de mon personnage ; et aussi parce que le journal mène à tour comme on l’a souvent répété. Dans une autre profession, il fallait des connaissances spéciales, des préparations plus longues. Les portes pour entrer sont plus fermées, celles pour sortir sont moins nombreuses. La Presse est une sorte d’immense république qui s’étend de tous les côtés, où on trouve de tout, où on peut tout faire, où il est aussi facile d’être un fort honnête homme que d’être un fripon. Donc, mon homme, entrant dans le journalisme pouvait employer facilement les moyens spéciaux qu’il devait prendre pour parvenir. Il n’a aucun talent. C’est par les femmes seules qu’il arrive. Devient-il journaliste, au moins ? Non. Il travaille toutes les spécialités du journalisme sans s’arrêter, car il monte à la fortune sans s’attarder sur les marches. Il débute comme reporter, et il passe. Or, en général, dans la Presse, comme ailleurs, on se cantonne dans un coin, et les reporters, nés avec cette vocation, restent souvent reporters toute leur vie. On en cite devenus célèbres. Beaucoup sont de braves gens, mariés, qui font cela comme ils seraient employés dans un ministère. Duroy devient le chef des Échos: autre spécialité fort difficile et qui garde aussi ses gens quand ils sont passés maîtres. Les Échos font souvent la fortune d’un journal, et on connaît dans Paris quelques échotiers dont la plume est aussi enviée que celle d’écrivains connus. De là Bel-Ami arrive rapidement à la chronique politique. J’espère, au moins, qu’on ne m’accusera pas d’avoir visé MM. J.-J. Weiss ou John Lemoine ? Mais comment me suspecterait-on d’avoir visé quelqu’un !

Article de Maupassant publié par Martin Pasquet, dans Maupassant, biographie, étude de l’œuvre. collection « Classiques », Albin Michel, Paris, 1993.

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